BURUNDI; 183 morts dans des violences interethniques
Adrien JAULMES, AFP, Le Figaro 19 septembre 2002
Le gouvernement burundais a confirme hier le massacre de 183
personnes au cours d'une attaque dont s'accusent mutuellement l'armee,
dominee par la minorite tutsie, et les rebelles hutus. La tuerie a eu lieu a Itaba,
dans la province de Gitega, au centre du Burundi, a 130 kilometres a l'est de la
capitale Bujumbura. ' Fuyant des affrontements, ces personnes s'etaient
refugiees dans deux maisons sur des collines et ont ete tuees froidement
par des gens en uniforme. D'apres les survivants, les meurtriers sont entres
dans les maisons, ont demande a tout le monde de se coucher et les ont tous
abattus ', avait declare mardi Leonidas Ntibayazi, president de la commission des
droits de l'homme a l'Assemblee nationale burundaise. Sur les 183 personnes
massacrees, 112 ont ete formellement identifiees comme etant des civils, a precise
M. Ntibayazi, qui est aussi president du groupe parlementaire du Front pour
la democratie au Burundi (Frodebu), le principal parti hutu du pays.
Un porte-parole du gouvernement a annonce hier l'ouverture d'une
enquete pour determiner les auteurs de l'un des pires episodes d'une guerre civile
qui dechire depuis neuf ans ce petit pays d'Afrique centrale. Les 250 000
morts de ce conflit sont presque tous des civils, massacres par l'armee ou par la
rebellion hutue.
Selon le gouverneur de la province de Gitega, Tharcisse Ntibarirarana, la
population locale attribue la tuerie a l'armee. L'accusation a ete reprise par
le principal mouvement rebelle hutu des Forces pour la defense de la
democratie (FDD), qui a estime que le chiffre total des victimes pourrait atteindre
1200. '
L'armee a rassemble la population de deux collines de Kanyonga et Kagoma
avant de les tuer. Certains ont ete tues a coups de fusil, d'autres a l'arme
blanche ', a declare le porte-parole des FDD.
' C'est de la pure propagande. L'armee ne porte aucune responsabilite
dans ce massacre contre des civils ', a retorque le porte-parole de l'armee
burundaise, le colonel Augustin Nzabampema. ' Le reste de la population de ces
collines s'etait refugie sur les positions militaires depuis trois jours que
duraient les affrontements dans cette commune ', a-t-il explique.
En l'absence d'observateurs impartiaux, il est peu probable que la
responsabilite du massacre de Gitega soit clairement etablie.
L'annonce de la tuerie a aussi contribue a reporter la reprise en
Tanzanie d'un nouveau cycle de pourparlers entre le gouvernement de Bujumbura et
les FDD, qui doit s'ouvrir aujourd'hui. Un premier cycle de negociations entre
les deux parties, a la mi-aout, n'avait donne aucun resultat tangible.
Les FDD exigent, avant de negocier directement avec la delegation
gouvernementale, que le pouvoir reconnaisse ses responsabilites dans le
declenchement de la guerre civile en 1993, et que soient notamment punis
les commanditaires de l'assassinat du president hutu Melchior Ndadaye.
Condition que le gouvernement rejette categoriquement.
Les rebelles des FDD accusent l'armée d'avoir tué plus de 1.000
personnes AFP 18/09/2002
Le principal mouvement rebelle hutu, les Forces pour la defense de la
democratie (FDD), a accuse mercredi l'armee burundaise, dominee par la
minorite tutsie, d'avoir massacre plus de 1.000 personnes le 9 septembre dans le
centre du pays.
Le gouvernement a immediatement qualifie ces allegations de
"surencheres" de la rebellion, a la veille de l'ouverture de pourparlers de paix en
Tanzanie, et annonce la creation d'une commission d'enquete sur la tuerie.
"L'armee a massacre plus de 1.000 personnes dans la journee du lundi
9 septembre", a declare a l'AFP le lieutenant Gelase-Daniel Ndabirabe,
porte-parole des FDD, au cours d'une conversation telephonique.
"L'armee les avait rassemblees sur les collines de Kagoma, Kabagabaga
et Kanyonga (dans la province de Gitega, centre du pays), soit-disant pour
les proteger", a-t-il affirme.
"Un des rescapes de ce massacre nous a meme precise que ce sont 1.200
personnes - hommes, femmes, enfants, vieillards - qui ont ete tuees
froidement ce jour", a-t-il ajoute.
Les accusations du porte-parole des FDD n'ont ete confirmees par
aucune source independante.
Leonidas Ntibayazi, president de la commission des droits de l'Homme
au sein de l'Assemblee nationale, avait parle d'un massacre de 183 personnes,
dont 112 civils identifies, le 9 septembre dans le centre du Burundi, sans
pouvoir identifier les auteurs de la tuerie. Ce chiffre avait ete confirme par
le gouverneur de Gitega.
"C'est de la surenchere de la part des FDD qui veulent exploiter
politiquement ce malheur a la veille des negociations de Dar es-Salaam",
a declare Albert Mbonerane, le ministre burundais de la Communication et
porte-parole du gouvernement.
"Nous avons constitue une commission mixte d'enquete ce matin
(mercredi) au cours d'une reunion du Conseil de securite presidee par le
vice-president, elle doit donner son rapport au plus tard demain" jeudi, a precise le
ministre.
Cette commission est dirigee par le commandant de la 2eme region
militaire et par le gouverneur de la province de Gitega. "Des instructions claires
leurs ont ete donnees", a affirme le porte-parole de l'armee, qui a assure
"leur faire confiance pour mener a bien leur mission".
"Au gouvernement, nous voulons comprendre ce qui s'est passe, etablir
les faits et savoir la verite sur les victimes et les circonstances. Puis
nous allons prendre les dispositions qui s'imposent", a ajoute M. Mbonerane.
"Les dispositions militaires prevoient des sanctions s'il etait
prouve que ce sont des militaires qui ont opere un tel massacre dans les conditions
decrites", a-t-il dit.