LA CPODR* PROPOSE AU GOUVERNEMENT DE KIGALI DE SURSEOIR
AU PROCESSUS CONSTITUTIONNEL ET ELECTORAL EN COURS
Fidèle à ses options pacifiques pour résoudre le conflit rwandais, la CPODR a obtenu des groupes
armés qui lui sont proches l'abandon de toute lutte armée afin de s'intégrer dans le combat politique
en faveur de la démocratie, la réconciliation et la stabilité au Rwanda et dans la sous-région.
Force est cependant de constater que d'une part :
Le gouvernement de Kigali ne semble pas pressé de répondre aux voix nombreuses qui l'incitent à
l'ouverture politique. Il maintient en prison plusieurs prisonniers politiques dont notamment Pasteur
Bizimungu (ex-Chef de lEtat), Charles Ntakirutinka (ex-Ministre), Jean Mbanda (ex-Député) et Pierre
Gakwandi (cadre du MDR) ;
Le gouvernement de Kigali a manifestement beaucoup de mal à cesser le harcèlement de la société
civile et de la presse ;
Le gouvernement de Kigali fait toujours la sourde oreille à l'impératif de libéraliser les activités
politiques sur l'ensemble du territoire national en vue de permettre à l'opposition intérieure de sortir
de la clandestinité et à l'opposition en exil de rentrer au pays, pour participer au processus
constitutionnel et électoral ;
Le gouvernement de Kigali poursuit sans vergogne sa politique d'intimidation pour décourager toute
velléité d'opposition à l'intérieur du pays. Il n'hésite pas à recourir à la corruption dans l'espoir de
phagocyter et affaiblir l'opposition en exil. La dernière prouesse du FPR en matière de démocratie est
la mise en place, la semaine passée, d'une commission parlementaire chargée de dissoudre le
Mouvement démocratique républicain (MDR), pourtant membre de la coalition gouvernementale et
d'où sont issus tous les Premiers Ministres du Rwanda depuis le 19 juillet 1994.
D'autre part, l'hégémonie politique et militaire du FPR augure mal d'une démocratisation authentique.
La mainmise totale du Front patriotique rwandais(FPR) sur toutes les institutions transitoires
actuelles et sur tous les rouages de l'économie nationale, ne permet pas du tout d'entrevoir une fin
de transition porteuse d'espoir en vue d'une solution durable au conflit inter-rwandais. Tout se fait
comme si le Président Kagame avait décidé de constitutionnaliser et de pérenniser l'état d'exception
du Rwanda post-génocide.
En effet, après des élections locales organisées à sa convenance qui lui ont assuré un contrôle sans
limite sur l'appareil de l'Etat dont il a, par ailleurs, unilatéralement changé les symboles nationaux
(drapeau, hymne), le Général Kagame est aujourdhui sur le point de faire adopter une constitution
qui consacrera sa dictature sur le pays.
La CPODR estime qu'un gouvernement dominé par le FPR n'est pas en mesure de poser seul les
fondements solides et durables pour la paix, la démocratie et la réconciliation au Rwanda et dans la
région. Elle entend être associée, avec toutes les forces vives de la Nation, à la définition des
orientations constitutionnelles de l'après-transition et renouvelle à cet effet, sa volonté ferme de
mener ses activités politiques à l'intérieur du Rwanda dès que possible . La CPODR plaide pour
lélaboration d'un projet de constitution par des représentants du peuple dûment désignés par le
Dialogue inter-rwandais avant de le soumettre à un référendum populaire. La CPODR trouve en outre
inacceptable que les Rwandais puissent se contenter d'une démocratie au rabais et d'une
constitution qui, en matière de liberté d'expression et du pluralisme politique notamment, irait en de
ça des acquis de l'accord de paix dArusha qui reste une référence.
La CPODR réitère son attachement à un authentique processus de démocratisation-réconciliation qui
passe à ses yeux par un débat sans complaisance sur les défis majeurs de la société rwandaise. A cet
égard, la CPODR reste fermement convaincue de la nécessité et de l'urgence d'un dialogue politique
inter-rwandais hautement inclusif. C'est en prévision de la tenue dun tel dialogue que la CPODR
demande au Président Kagame de prendre en compte sa proposition de repousser le référendum
constitutionnel et les élections législatives et présidentielles, le temps d'en réunir les conditions de
réussite, dans l'intérêt suprême du peuple rwandais et de celui de la région des Grands Lacs qui subit
de plein fouet les retombées de la crise inter-rwandaise non résolue.
La CPODR a noté avec satisfaction que grâce aux pressions de la communauté internationale, dans le
cadre de l'accord de Pretoria, le gouvernement de Kigali a retiré ses troupes de la République
démocratique du Congo. Même si le caractère effectif et total de ce retrait reste à vérifier, il n'en
demeure pas moins qu'il constitue une opportunité réelle pour la pacification et la stabilisation du
Rwanda et de lAfrique des Grands Lacs.
Ainsi, en complément au mémorandum du 05 décembre 2002 relatif à sa position sur la fin annoncée
de la transition au Rwanda, la CPODR entend-elle aujourdhui préciser ses propositions à l'intention
de l'opinion, afin de permettre notamment aux Rwandais et aux partenaires du Rwanda, d'apprécier
l'évolution politique en connaissance de cause. Elle demande de surseoir au processus en cours et
propose le calendrier ci-dessous en vue d'une fin de transition prometteuse.
I. Calendrier prévisionnel pour une fin de transition sans heurts
1. Mars 2003 : une rencontre entre le gouvernement et l'opposition destinée à créer un climat de
confiance et esquisser un agenda pour les échéances en vue. Lieu à déterminer.
2. Avril 2003 : préparatifs du Dialogue inter-rwandais.
Lieu : Rwanda
Mai 2003 : dialogue inter-rwandais proprement dit. Lieu : Rwanda
Juin 2003 : mise en place des institutions de transition à base élargie
Décembre 2003 : référendum constitutionnel
Janvier 2004 : promulgation de la Loi électorale
Février 2004 : début de la campagne électorale
Juin 2004 : tenue des élections
II. Les principaux thèmes à inscrire à lagenda du Dialogue inter-rwandais
Le génocide, les massacres et autres crimes contre l'humanité
Le contentieux politico-ethnique
La protection des minorités
Le défi lié à l'interprétation de l'histoire du Rwanda
La définition des missions des forces de défense et de sécurité
La démilitarisation de la société rwandaise
La Justice et la Réconciliation
La coopération régionale et internationale
La réduction de la pauvreté et la lutte contre les maladies endémiques
La problématique liée aux groupes les plus vulnérables (les rescapés du
génocide et des massacres, la jeunesse, les femmes, les veufs, les orphelins,
les handicapés )
La mise en place d'institutions transitoires inclusives.
III. Les participants au Dialogue inter-rwandais
Le gouvernement de Kigali
L'opposition
La société civile
Les organisations paysannes
IV. Les observateurs internationaux
A déterminer
La CPODR renouvelle son invitation au Président Kagame à un dialogue sincère et constructif et
demande à la Communauté internationale d'exercer des pressions dans ce sens. La CPODR est
convaincue qu'une éventuelle légitimation du régime actuel dans sa dangereuse fuite en avant
entraînerait le recours à des options violentes dans le chef d'un peuple floué et frustré. La CPODR
met en garde l'opinion contre les conséquences désastreuses dun tel scénario.
Fait à Bruxelles, le 09 janvier 2003
Pour la Concertation Permanente de lOpposition Démocratique Rwandaise (CPODR)
Les organisations membres de lUFDR
Forces de Résistance pour la Démocratie (FRD)
Eugène Ndahayo
Président (sé)
Rassemblement Républicain pour la Démocratie au Rwanda (RDR)
Victoire Umuhoza-Ingabire
Présidente (sé)
Les organisations membres de lAlliance IGIHANGO
Alliance pour la Renaissance de la Nation (ARENA)
Augustin Kamongi
Président (sé)
Forces Démocratiques de Libération du Rwanda (FDLR)
Ignace Murwanashyaka
Président (sé)
« Nation-Imbaga yInyabutatu Nyarwanda »
Joseph Ndahimana
Délégué Général (sé)
Union des Rwandais pour la République et la Démocratie (URD)
Jean Marie Nkezabera
Président (sé)
* CONCERTATION PERMANENTE DE LOPPOSITION DEMOCRATIQUE RWANDAISE