Journée de Réflexion et de Propositions sur le projet de
Constitution Rwandaise, 29 mars 2003, Bruxelles.(I.D.E et
C.I.E.R.)
Existe-t-il un modèle idéal de constitution ? NON
Marc Uyttendaele - Avocat - Professeur de Droit Constitutionnel
ULB
Des élections libres contestée (compétition) basée sur le
multipartisme + décentralisation pour éviter qu'un petit groupe ne
dirige seul le pays.
Modestie et humilité des auteurs des constitutions.
La constitution est souvent à la remorque de la réalité, elle ne
doit pas la précéder sinon il y a rupture. Il faut penser son
noyau dur. Coûte que coûte éviter les textes massifs qui
veulent tout épouser sinon duplication dautres textes adaptés
à dautres réalités.
Logique d'humilité : ne pas importer ses rêves et ses
phantasmes.
Trouver le plus grand dénominateur commun.
Belgique : logique du possible.
On n'impose pas la démocratie. Elle se façonne pas à pas. Culture
plutôt que construction juridique.
Constitution : comme une grande armoire avec beaucoup de tiroirs. Le
plus important est le premier. S'il est trop rempli, il ne se ferme pas et
les suivants non plus. Imaginer le premier. On peut se limiter au 1er : base du fonctionnement minimal de l'Etat.
Il doit contenir :
1° Le principe d'Impartialité de lEtat
Pouvoir exercé dans lintérêt général
Impartialité dans les services publics
a) Politiciens
b) Administrateurs
c) Juges
+
d) Educateurs
2° Séparation des pouvoirs : pluralité des pouvoir pour quil y ait
confrontation.
Existence de contrôle : pour doser le degré dimpartialité
Vigoureux débat public : presse libérée.
Problème dans dans un contexte de vie ou de mort : question de la
conquête du, maintien au et perte du pouvoir.
Pas de démocratie sans élections libres ni multipartisme.
Le multipartisme ne doit pas nécessairement présent au début.
Phases pré-démocratique : élections libres comme un but
dans la constitution.
3° Pérennité de l'administration impartiale et compétente :
Importance de la formation, Investir massivement dans la
formation.
Prévoir l'alternance.
Reconnaissance de tous ceux qui ont servi le pouvoir : système
de rassurance.
Sécurisation des acteurs politiques.
Incompatibilités et rémunération correcte : protection
contre la corruption.
Le fait de quitter le pouvoir ne doit pas être une question de
vie ou de mort.
1er tiroir : impartialité
2e tiroir : libertés.
Anne Feyt Assistante du Professeur Marc Uyttendaele ULB.
Dialogue systèmatique gouvernants-gouvernés.
Constitution par Assemblée représentative (constituante) ou
consultation populaire (referendum) ?
Assemblée représentative (constituante) : débat de fond et
de qualité mais risque de travail en vase clos.
Consultation populaire (referendum) : risque que soit un
plébiscite, renouvellement de la « confiance » aux
gouvernants.
Si pas débat au niveau local, principes vus comme étrangers,
lointains : démocratie investie plutôt que démocratie alibi. Créer l intérêt pour la chose publique.
Démocratie moderne : éviter la concentration du pouvoir.
Lieux de débat locaux : foyers de futurs gouvernants.
La démocratie nexiste pas sans multipartisme. Il faut enraciner
les partis dans la réalité locale.
Sécuriser l'opposition et les minorités et assurer leur représentativité.
3 grands principes : Impartialité de lEtat.
Implication des gouvernés.
Pluralisme.
Ensemencer l'idée démocratique sinon échec.
Modestie : mobilité du droit. Il faut pouvoir adapter la constitution
au modèle démocratique autrement coup de force.
Le pluripartisme doit être un objectif. Le 1er tiroir (de la constitution)
doit prévoir son activation.
Analyse critique du projet actuel de constitution
Filip Reyntjens Professeur de Droit Universiteit Antwerpen
Depuis novembre 2002 : 3e avant-projet de constitution, la dernière
date de février.
Ma prochaine analyse sera celle de la constitution à proprement
parler.Il y a de nombreuses dispositions classiques (no comment).
Il faut véritablement deviner lintention des auteurs : formulations
opaques.
Difficile dimaginer son fonctionnement concret. Cest lamentable.
Le constitutionnaliste qui fonctionne en vase clos, en dehors de la
réalité politique est un imbécile ! Juriste constitutionnaliste (au
Rwanda) s'il n'y en a pas, il en faudrait.
Nationalité rwandaise
Personnes hors du pays entre 1959 et 1994 ayant acquis une
autre nationalité : nationalité automatique, problème dans les
(anciens) pays (daccueil) qui ne permettent pas la double
nationalité (perte).
Aspect pénal
Arbitraire si révisionnisme, banalisation du génocide pas dans le
code pénal.
Rejet de l'ethnisme et négation des identités ethniques (cfr
Burundi)
Option fondamentale du régime mais sans fichage comment
appliquer les proportions ethniques dans les partis politiques et
les institutions.
Belgique : système consociationnel, la langue de la prestation
de serment détermine lethnie.
Partis politiques
Art. 53 Partis au niveau provincial uniquement mais le FPR est
lui organisé au niveau local.
Les partis ne sont pas les seuls véhicules de construction de la
citoyenneté.
Seuil électoral : 4%
En dessous, parti interdit dans avant projet de nov. 2002
suspendu de déc. 2002
pas de siège (dans le parlement) fév. 2003
Le Forum : organe de contrôle des partis en faveur du FPR
confer Madagascar dans les années 70 (tous les partis
devaient se réunir dans un forum de concertation).
Parlement
Art. 62 Le pouvoir législatif est exercé par le parlement. Dans
les faits aussi par le Président puisquil a un droit de veto
suspensif.
Art. 76, parlement de 80, membres, 27 membres élus
indirectement (au travers de conseils dominés par le FPR) ou
désignés + 24 sièges garantis aux femmes. Avec des listes qui
seront confrontés au même problème qu »e les direction de
partis en ce qui concerne les dosages ethniques (puisque les
ethnies sont occultées).
Art. 77 : 57 élus directs dont une moitié de femmes donc
seulement 28 hommes ! (cette exemple illustre bien les
imperfections techniques).
Sénat
Sénat : on ne peut dissocier un texte de la réalité politique.
Sénat + Forum + Cour suprême : chiens de garde institutionnel
du FPR.
Art. 80 : le Président désigne 2 sénateurs dans la catégorie
historiquement la plus défavorisée. De qui sagit-il ? Les
Batwas ?
Régime parlementaire, présidentiel, semi-présidentiel ?
Pas de responsabilité du Président : problème si le
gouvernement ne fait quapprouver ce qua décidé le Président. Prise de décision par consensus.
Dernière version : solidarité gouvernementale. La note infra-
paginale (nulle part ailleurs dans une constitution !) donne une
explication erronée du principe de solidarité gouvernementale
« le ministre qui n'est pas d'accord avec le Président doit
démissionner ». (Art. 1 : le chef a toujours raison, Art 2 : dans
les cas où il naurait pas raison, l'Art. 1 entre en vigueur).
La composition du gouvernement devrait refléter celle du
Parlement. Pas un régime présidentiel puisque pas de
séparation des pouvoirs. Régime présidentialiste ?
Art. 195 : La constitution entrera en vigueur après le referendum, la
disposition dun projet na aucune portée juridique.
Si un autre parti remportait les élections, la constitution ne
fonctionnerait pas. Il y a des pratiques, des stratégies de
dissimulation, dévitement. Il ne faut pas appuyer financièrement ce
processus. Ce serait une légitimation du pouvoir qui entraînerait le
refus du dialogue (ce quon recherche au Rwanda).
Consensus imposé et contrôle : nouveaux conflits violents.
Analyse comparée des Constitutions au Rwanda
Charles Ntampaka - Maître de conférence aux FNDP - Namur.
6 constitutions.
Problème de l'appropriation du droit par les bénéficiaires.
Sujet de droit : du lignage à lindividu.
Absence de jurisprudence.
1ère Constitution 1961 famille nucléaire, propriété privée, prestation
de serment « au
nom de Dieu », mariage religieux,
monogamie, exclusion des
femmes à la présidence de la République.
2e 1962 revue en 1963
et en 1973 (mai) pour permettre la
réélection de Grégoire
Kayibanda.
3e 1978 (20 déc) supprime le multipartisme de iure. Présidence : candidat
unique (du MRND). Fin de lexclusion
des femmes à la
candidature à la présidence. Président de la République et
Président du Conseil suprême de la
magistrature, Président
du Parti.
4e a 1991 (10 juin) Multipartisme, poste de Premier
ministre (dans la
constitution de 1961). Pas de cumul
ministre-député.
Modifications
b 1993 (août) Accords dArusha, Protocole de
l'Etat de Droit :
reconnaissance du multipartisme. Art.111 : primauté des accords
sur la Constitution
c + Déclaration du FPR.
d + Accords des Partis politiques et le FPR.
a + b+ c+ d = loi fondamentale depuis 1994.
2003 Avant-projet
-Absence de continuité,
-Protection du pouvoir, pouvoir fort,
-Rien nest prévu pour lalternance
(lopposant est perçu comme un ennemi,
le mot opposant n'existe pas en Kinyarwanda),
-Monopartisme de fait,
-Laïcisation,
-Droits économiques sans conviction,
-Grand écart avec la tradition rwandaise (problème d'appropriation)
PM, 04/04/03